Le rocher de Pierre-Châtel est un bloc de la chaîne Parves-Tournier épargné par le lent processus qui, de taraudages en effondrements, a creusé la cluse de Yenne-La Balme. La plus ancienne mention du nom figure dans le dénombrement, fait en 1149, des fiefs laissés à sa mort par Amédée III, comte de Maurienne, où l’on trouve la maison forte et la terre de Petra Castri.
Avant que ne fut construite au XVIIIe siècle la route moderne, le voyageur qui touchait terre à Saint-Blaise n’avait devant lui qu’un chemin fort pentu qui pointait droit sur Pierre-Châtel et, si sa destination était Belley, il lui fallait, après être monté jusqu’aux Étables, prendre à gauche le chemin qui le faisait redescendre sur Virignin. Telle était l’ancienne route de Saint-Blaise à Belley : axée d’abord sur Pierre-Châtel.
On sait qu’à une époque où les princes résidaient peu dans les capitales, mais se déplaçaient avec leur conseil et leurs proches de château en château, Pierre-Châtel fut souvent résidence princière et que, pour n’en citer qu’un, le comte Thomas de Savoie, un des plus avisés princes de la lignée, séjourna souvent à Pierre-Châtel, notamment au cours des années 1196, 1209 et 1231.
On sait qu’au XIVe siècle fonctionna à Pierre-Châtel un atelier temporaire de monnaies.
C’est à Pierre-Châtel aussi qu’étaient célébrées en grande pompe les funérailles des membres de l’ordre chevaleresque du Collier, fondé en 1364 par Amédée VI, le comte Vert. C’est là que se tinrent jusqu’à la réunion du Bugey à la France en 1601, les chapitres de l’ordre, devenu en 1518, l’ordre de l’Annonciade.
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C’est au comte Vert qu’on doit, par décision testamentaire de 1383, exécutée par sa veuve Bonne de Bourbon à partir de 1384, la fondation d’une chartreuse à Pierre-Châtel, pour quinze moines « qui prieraient Dieu et célébreraient tous les jours messe pour le salut de son âme, de ses prédécesseurs et de ceux qui étaient et seraient chevaliers de son ordre du Collier ».
La première pierre de la chapelle fut posée en octobre 1393, en présence de toute la cour de Savoie et d’environ 1300 invités venus avec 700 chevaux. Les chartreux restèrent là jusqu’en 1792.
Pendant ces quatre siècles, Pierre-Châtel resta pourtant forteresse, la garnison étant placée sous les ordres du prieur, secondé par un officier civil. Pendant ces quatre siècles aussi, la chartreuse avait acquis des biens fonciers considérables, qui furent vendus comme biens nationaux.
Après le départ des religieux, restent les militaires, mais la citadelle, depuis l’annexion de la Savoie, n’est plus place frontière et on n’y loge qu’une compagnie de vétérans.
Sous le Ier Empire, les bâtiments sont partagés entre le département de la Guerre, qui y conserve ses vétérans, et le ministère de l’Intérieur, qui y garde des condamnés à la déportation, puis des prisonniers d’État.
En janvier 1814, à l’approche des Autrichiens, le capitaine Garbé qui commande la garnison fait évacuer les prisonniers par le Rhône. Le 29 mars, les Autrichiens investissent la forteresse. Garbé, à la tête de ses vétérans, résistera 48 jours avant de quitter la place avec les honneurs de la guerre, après la première abdication de Napoléon Ier.
En 1815, Garbé tient à nouveau tête aux Autrichiens et subit un blocus de deux mois qui prend fin avec le départ des envahisseurs. Il a entre-temps, sur ordre supérieur, amené le drapeau tricolore et hissé le drapeau blanc des Bourbons, mais sans rendre la place.
À la Restauration, Savoie et Haute-Savoie réintègrent l’État sarde. Pierre-Châtel est à nouveau sur la frontière.
On va donc renforcer ses défenses par la construction de Fort-les-Bancs de 1840 à 1850, puis des batteries basses de Saint-Blaise de 1859 à 1865. À cette date, la place est fin prête à barrer la route aux Savoyards... français depuis 1860.
Déclassée en 1889, la citadelle survit comme simple casernement. Elle sera occupée par un détachement du 133e RI jusqu’en 1921.
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En 1932, les Domaines cèdent Pierre-Châtel à Madame
[/Documentation rassemblée par Suzanne Sallaz et Raymond Vanbrugghe. /]